French text
Mais Didon effrayée, et d’un affreux visage,
Témoignant le dessein d’un terrible courage,
Rouant de ses deux yeux les prunelles sanglantes,
D’un teint entremêle en ses joues tremblantes,
Et déjà de la mort prochaine toute pâle,
Se jette au plus profonde de sa maison royale.
Et de même fureur, d’un grand pas élancé,
Monte jusqu’au dessus de ce bois entassé,
Prend le glaive Troyen, le dégaine de fait,
Qui n’était point, hélas, donné pour cet effet.
Là voyant devant soi les parements de Troie,
Et son lit bien connu, s’arrête toute coye
larmoyante et pensive un bien petit espace,
puis dit ces derniers mots devant qu’elle trépasse:
'Agréable dépouille, autant que l’ont permis
La fatale ordonnance et les dieux, mes amis.
Ores reçois cette âme et de tant de souci
La délie d’un bon coup. J’ai vécu jusqu’ici:
J’ai le cours accompli ordonné pour mon âge.
Sous la terre maintenant ira ma grand image.
J’ai construit et fondé cette belle cite:
J’ai vu mes murs bâtis, l’horrible cruauté
Contre mon feu mari par mon frère exercée
Je puis dire avoir vu à mon souhait vengée.
Heureuse, heureuse et trop heureuse, hélas,
Si de mes ports la flotte des Troyens
N’eut onques touché les bords.'
Achevant ce propos, se jette sur sa couche,
Et tenant sur le lit imprimée sa bouche,
‘Comment? Comment, mourrons-nous donc?
Mourrons-nous sans nous venger?’ dit-elle.
'Mais mourrons: car la mort me plaît toute telle.
Ces feux, cet inhumain voie de la mer haute,
Présage par ma mort des peines de sa faute.’
Ainsi elle parla. Quand ses dames l’ont vue,
En parlant, sur le fer déjà tout étendue,
Ca, là battant des bras, et du sang écumant,
Après le coup donné le glaive tout fumant.
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English translation
From Book 4 of the Aeneid, translated from Latin by Theodore C. Williams, Boston, Houghton Mifflin Co. 1910:
But Dido, trembling and frantic with her dreadful design,
rolling bloodshot eyes,
her quivering cheeks flecked with burning spots,
and pale at the imminence of death,
bursts into the inner courts of the house,
climbs the high pyre in a frenzy
and unsheathes the Dardan sword,
a gift sought for no such purpose.
Then, as she saw the Trojan garb and the familiar bed,
pausing awhile in tearful thought,
she threw herself on the couch and spoke her last words:
“O relics once dear, while God and Fate allowed,
take my spirit, and release me from my woes!
My life is done and I have finished the course that Fortune gave;
and now in majesty my shade shall pass beneath the earth.
A noble city I have built; my own walls I have seen;
avenging my husband, I have exacted punishment
from my brother and foe – happy, too happy,
had but the Dardan keels never touched our shores!”
She spoke, and burying her face in the couch,
“I shall die unavenged,” she cried,
“but let me die! Thus, I go gladly into the dark!
Let the cruel Dardan’s eyes drink in this fire from the deep,
and carry with him the omen of my death!” She ceased;
and even as she spoke her handmaids saw her fallen on the sword,
the blade reeking with blood and her hands bespattered.
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